vendredi 17 février 2012

Vendredis intellos : pour ne pas étrangler l'enseignant de son enfant...

Dessin de Pancho, trouvé sur le site ecolesdifferentes.org
J'ai choisi il y a déjà quelques années le métier de professeur des écoles, et depuis la rentrée de septembre, j’expérimente la douce fonction de parent d’élève ; d’où l’envie de vous faire partager mes interrogations sur les relations parents/profs.
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’on touche là une question sensible. Je ne m’attarderai pas sur les causes de ces relations difficiles mais ô combien nécessaires mais je prendrai comme point de départ un passage de « Au cœur des émotions de l’enfant » de Mme Filliozat.
« … Trop d’enseignants manient la dévalorisation. Pour certains, l’humiliation est une méthode pédagogique ! » […] « Il a peur de son professeur ? Il ne veut plus retourner  à l'école ? Écoutez votre enfant. Ne prenez pas parti systématiquement pour l’enseignant. S’il a peur, c'est qu'il a mal vécu quelque chose, il est important de savoir quoi pour l'aider à faire face ou le protéger[…]Ne banalisez  pas l'autoritarisme, l'injustice, l'ironie ou les menaces d’un enseignant. Prenez clairement le parti de votre enfant. Aucun adulte, pas même un professeur n’a le droit de lui faire du mal, de le blesser,  ni bien sur de le frapper. Selon les circonstances et la gravité, aidez votre fils (fille) à trouver des réponses aux réflexions désobligeantes, allez voir l’enseignant et demandez lui de modifier son attitude, déposez plainte, retirez votre enfant de cette classe, voire de cette école. »
Je ne suis pas fan de ce passage, non sur le fond mais dans la formulation, qui je trouve incite à la défiance envers les professeurs. Mme Filliozat brosse un portrait bien peu flatteur des enseignants. Je ne nie pas qu’il existe des professeurs malveillants, mais je pense que beaucoup de relations sont surtout gâchées par des malentendus.  Tout d’abord, le professeur est lui aussi une victime de la culture du « t’es nul » dont j’ai déjà parlé ici. Il l’a subie lorsqu’il était élève, jusqu’à sa sortie de l’IUFM. Rien dans sa maigrichonne formation initiale ne lui permet de s’en extraire, puisque la communication n’est absolument pas enseignée.
En outre, sous son apparence éventuelle de morgue ou de froideur, l’enseignant est souvent aussi stressé à l’idée de rencontrer les parents d’élèves que le sont ces derniers. Parfois le maître, échaudé par des mauvaises expériences, est sur la défensive.  J’ai fait preuve de maladresse souvent dans ma communication avec les parents de mes petits élèves. Mais j’ai trouvé aussi franchement blessant d’entendre que mon cours était mal fait, ou encore des remarques du type  « vous êtes trop sévères, vous faites peur à mon fils », alors que j’avais passé plusieurs heures à préparer pour l’élève un travail personnalisé. Et je passe sur les menaces physiques que certains collègues ont subies dans les écoles où j’ai travaillé…
En fin de compte, le meilleur conseil que je retiens de cet extrait est « écoutez votre enfant ». Pour l’instant, je m’en tiendrai à cette ligne de conduite : lorsqu’un problème survient, la première chose à faire est d’écouter ce que l’enfant a à dire.
Soit le comportement de l’enseignant est inacceptable voire illégal (coups, insultes) est dans ce cas il faut prendre son courage à deux mains et aller demander illico des explications, malgré l’éventuelle crainte des représailles envers son enfant (une collègue  pourtant très expérimentée m’a raconté qu’elle et d’autres parents d’élèves n’avaient pas osé intervenir devant  la façon de faire d’une maîtresse par crainte pour leurs enfants…).
Si le comportement de l’enseignant est juste discutable, l’enfant  est-il réellement bouleversé, au point que même une écoute active ne l’aide pas à résoudre son problème ? J’ai cru comprendre que Grand Doux s’est fait traiter de « bourrique » à  l’école,  mais quand je lui ai demandé ce qu’il avait ressenti, il m’a dit qu’il ne trouvait pas ça grave. Dans ce cas, même si le qualificatif ne me plaît guère, je ne vois pas l’intérêt d’aller trouver son enseignante.
Le cas échéant, si un commentaire ne passe pas et que l’enfant paraît vraiment troublé, une entrevue courtoise peut aider à résoudre le problème.
Avec la maîtresse de Grand Doux, je n’apprécie pas le manque de chaleur de l’accueil du matin, le zèle avec lequel sont organisées des évaluations pour tout et n’importe quoi (principalement des items du type « dit bonjour », « dit merci »). De la même façon, je suis moyennement convaincue par sa propension à voir des caprices chez les enfants dès lors que leur attitude ne correspond pas à ses exigences. D’après ce que j’en vois, j’ai l’impression que sa pédagogie est très scolaire (fiches, exercices…) pour des enfants de petite section. Pour autant, je dois reconnaître que Grand Doux apprend beaucoup de choses avec elle : il est ravi de commencer à apprendre les lettres et très fier de nous ramener ses cahiers d’exercices.  Même si je rêve d’une école bien différentes de celle que nous avons, je trouve qu’il est bon qu’il apprenne à se frotter à des personnes qui ont des façons de autres que les nôtres, du moment que ces personnes sont globalement bienveillantes.  Grand Doux n’a pas vocation à passer sa vie dans le cocon familial !
Il ne faut pas oublier non plus que l’enseignant que nous critiquons parce qu’il ne correspond pas à notre idéal représente peut-être, pour quelques élèves de sa classe, une des rares petites lueurs d’espoir dans de jeunes vies déjà bien lourdes. Et puis, qui sait si, un jour, un maître que je n’apprécierai pas forcément ne va pas aider mon enfant à découvrir une nouvelle passion, voire à trouver une vocation ? Pour toutes ces raisons, j’aimerais que mes garçons apprennent le respect des professeurs, et ils ne pourront sans doute l’apprendre que si je m’abstiens de regarder la plupart d’entre eux avec défiance.
Enfin,  il est important que les enfants apprennent à résoudre leurs problèmes sans être constamment parasités par l’intervention de leurs géniteurs.  D’ailleurs, on ne peut pas prendre systématiquement le parti de l’enfant, parfois il faut bien reconnaître que le comportement en classe de notre chérubin laisse franchement à désirer.  Si les parents ont un rôle à jouer, c’est d’abord un rôle d’écoute et de soutien constructif: un passage de « Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants  parlent de Faber et Mazlish résume bien cette dernière attitude (l’extrait est un peu long pour que je vous le livre ne texte intégral) . Une mère reçoit un coup de téléphone d’un enseignant se plaignant du comportement de son enfant, si son premier réflexe et de punir l’enfant, elle se ravise et décide de l’écouter, sans lui faire la morale, afin qu’il puisse trouver de lui-même ses propres solutions. L’enfant et sa mère décident alors d’écrire ensemble une lettre à l’enseignant pour lui proposer les solutions découvertes.  L’enseignant accepte ses solutions et modifie son propre comportement. Hormis les cas les plus graves qui nécessitent une intervention énergique, de nombreux malentendus pourraient peut être se dissiper avec un peu d’imagination, d’écoute et pourquoi pas une touche d’humour, non ?
Voilà mon début de réflexions sur ce vaste sujet. A ce stade, vous remarquerez que j’ai plus de questions que de réponses à vous apporter. Qu’en pensez-vous ? Avez-vous de votre côté trouvé des solutions originales pour sortir de la guérilla parents profs ? 
PS : Pour les vendredis intellos, les neuroneuses ont déjà beaucoup réfléchi sur des extraits de cet ouvrage de Mme Filliozat, je vous invite à retrouver leurs contributions (merci à Madame Sioux et Clem pour leur super index bibliographique):

4 commentaires:

  1. Actuellement, je remplace une prof que ses élèves détestaient. Pourquoi, je ne le sais pas, ça ne me regarde pas. Mais les parents viennent me féliciter parce que je redonne envie à leur enfant de venir au collège. C'est plutôt flatteur et appréciable pour moi. Mis alors, j'ai demandé aux élèves pourquoi ils n'en avaient pas parlé à l'enseignante? Pourquoi les parents n'en ont-ils pas parlé avec elle? Demandé un rendez-vous?
    Je crois qu'elle était épuisée par ce métier et qu'elle ne savait plus gérer une classe.
    Quant à moi, j'ai déjà été insultée par des parents, dévalorisée devant leurs enfants, traitée de minable et de nulle par des parents qui avaient mal vécu leur scolarité. Ca fait mal et avec eux, on ne peut pas discuter. J'ai même eu envie de démissionner.
    Merci pour cet article.

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  2. Merci à toi Kiara de ton témoignage. Les gens ne s'imagient pas à quel point le métier d'enseignant peut être stressant et les remarques désobligeantes blessantes. On est trés vite catalogué mauvais prof, sans qu'un dialogue constructif s'engage. Je connais pas mal d'enseignants qui ont du arrêter, épuisés par leur métier. En plus les politiques actuelles suivies par l'éducation nationale n'arrange rien, tu ne crois pas ?

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  3. Bonjour Flolasouricette,
    Je suis tombée sur votre blog en cherchant désèspérement une aide sur internet,une réponse......
    Depuis la maternelle,mon fils "pose problème".Trop de joie de vivre,trop d'envie,trop de tout,il " épuise",d'apres ses enseignants,avec cependant d'excellents résultats scolaires.L'année derniere,il a vécu un harcelement lourd d'un enfant ( coups incessants,vols,insultes)sous les yeux de l'enseigante qui couvrait l'enfant harceleur,allant jusqu à humilier mon fils '( il devait "prêter " à son voleur)..J'ai saisie ' stop harcelement" qui a envoyé l inspection académique,on l' a changé d'école ( il était en privé et se retrouve en public).A peine arrivée dans la classe,il retrouve un petit garçon connu de toute l'école pour sa violence incessante,il ne communique que par les coups.Mon fils se défend,est puni et le cauchemar commence.....le directeur ( qui m' avait expressement demandé de ne pas dire à l'enseignante pourquoi mon fils arrivait en mai,parait il pour ne pas fausser son jugement) a commencé à me parler comme à une demeurée qui n'a pas éduqué son fils.De l'avis de tous,nous sommes tres complices et on m' a souvent souligné son savoir vivre et sa gentillesse,envers les filles qu'il protege notamment.Il a eu de nombreuses séances de psychologue dans son ancienne école,dans la nouvelle on m'envoit voir la psy de l école.....Des le départ,le ton a changé une fois qu'elle a su que j'avais cessé de travailler,ensuite ses questions étaient orientées ( avis personnel) " combien d enfants as tu cassé?Et toi,combien de fois t es tu cassé?" a moi le discours sur le basic de l'education,mon fils est enfant unique je suis sensée etre folle de lui au point de tout lui passer.....Mon fils a été choqué,et moi aussi par ces questions,je dis à la psy pour quelle raison nous sommes là,elle en lâche son stylo " ce n est pas ce qu on m avait dit".L enseignante le puni sans cesse,je l emmene en vacances plus tot et cette année,çà recommence avec un autre enseignant,qui est allé me dire " je comprends pourquoi vous avez changé d école avec un enfant pareil".Quand mon fils se fait agresser,il lui faut des témoins mais quand il se défend c est punition +fiche de reflexion,convocation des parents ce st à dire moi,son pere travaille beaucoup.La semaine derniere ,j ai perdu patience dans la cour,mon fils a des bleus,pleurs qu il ne veut plus aller à l école que le maitre est trop bete,et le maitre me dit " quoi?De quoi me parlez vous?qUELS BLEUS?" je deteste le déni,d autant que l'aide médical d un autre enfant qui est dans la classe de mon fils m a dit " madame votre fils est la tete de turc de monsieur M."......les parents en profitent pour un coup de pied dans un cartable pour se le faire payer car " le maitre a dit que",il ne se gene pas pour parler en mal de mon fils......j ai écris à l académie,aux assocs de parents d eleves,je n ai aucune réponse à ce jour,depuis des semaines,j essai d avoir la directrice au téléphone,elle ne répond pas.Je suis épuisée,desesperée,j 'ai mal de cette étiquette sur mon fils ,de tout ces gens qui suivent le troupeau.Si vous avez un conseil,n importe quoi,je vous laisse mon adresse email:mazoyerestelle@ymail.com

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  4. BONJOUR j'habite à la Réunion dans l'océan indien, et je découvre votre blog je souhaite vous remercier pour vos articles qui m'a permis d'analyser autrement des situations difficiles avec ma petite de 4 ans et mon grand de 9 ans à l'école et à la maison un grand merci

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